Japon: Le temple Engyōji à Himeji, de la sérénité millénaire au cinéma
Dernière mise à jour : 29 sept.
Le temple Engyōji (円教寺) est un complexe bouddhique situé sur le mont Shosha, à Himeji, dans la préfecture de Hyōgo. Fondé en 966, ce temple possède une histoire riche et mouvementée qui s’étend sur plus de 1000 ans. Pèlerinage et cinéma ont largement contribué à sa popularité récente. Retour sur les traces du "Last Samurai".
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Engyōji est un exemple remarquable d'architecture bouddhique japonaise appartenant à la branche Tendai. Avec ses bâtiments en bois magnifiquement construits, son environnement naturel préservé, et son importance spirituelle, il représente l'un des plus beaux temples du Japon et un lieu d'inspiration pour tout photographe.
Engyōji est également un site de pèlerinage reconnu. Il fait partie du Pèlerinage des 33 Kannon de la région du Saigoku, un circuit de temples bouddhiques dédiés à la déesse Kannon, la Bodhisattva de la compassion.
Outre ses valeurs culturelles, spirituelles et historiques, Engyōji a été abondamment utilisé comme décor pour le tournages de films internationaux, de séries japonaises ou de publicités. Le plus célèbre reste actuellement le film "Last Samurai" avec Tom Cruise et Ken Watanabe (voir plus-bas).
Comme tout domaine de cette importance, il a traversé des périodes majeures qui alternent entre prospérité, déclin et renouveau. Voici un aperçu de son évolution au fil des siècles.
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Origines, développement, déclin et renouveau d'Engyōji
Période Heian
Le temple Engyōji a été fondé en 966 par le moine Shōkū Shōnin (性空上人), un disciple du célèbre moine Ryōgen (912-985), qui était le 18e moine du temple Enryakuji, le centre principal de l'école Tendai, situé sur le mont Hiei près de Kyoto. Shōkū, également appelé "le saint de Himeji", est réputé pour avoir recherché un lieu propice à la méditation et à l'enseignement bouddhique. Selon une légende, c'est après avoir eu une vision qu'il a choisi le mont Shosha pour fonder Engyōji.
Période Heian à Muromachi
Sous l'influence de Shōkū Shōnin, le temple Engyōji est devenu un centre spirituel important, attirant de nombreux moines et pratiquants. Le temple a rapidement acquis une grande réputation, et de nombreux bâtiments ont été construits pour soutenir les activités religieuses et la formation des moines.
Durant la période de Kamakura (1185-1333) et la période Muromachi (1336-1573), le temple a continué de prospérer. C'était une époque où le bouddhisme Tendai jouait un rôle clé dans la société japonaise, avec des temples servant de centres culturels, éducatifs et spirituels.
Période Sengoku et Edo
Comme de nombreux autres temples bouddhiques au Japon, Engyōji a souffert durant la période Sengoku (15e-16e siècles), une époque de guerres civiles et de luttes pour le pouvoir entre différents clans de samouraïs. Plusieurs de ses bâtiments ont été endommagés ou détruits durant cette période.
Le temple a toutefois été restauré et revitalisé sous la période Edo (1603-1868), avec le soutien des seigneurs locaux, y compris la famille Ikeda, qui gouvernait le domaine de Himeji. Ils ont financé la reconstruction et l'entretien de nombreux bâtiments du temple.
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Période Meiji à période moderne
Avec l’avènement de la restauration Meiji en 1868, une politique de séparation du bouddhisme et du shintoïsme appelée Shinbutsu bunri a été mise en place, ce qui a entraîné la fermeture de nombreux temples et la destruction de leurs biens. Cependant, Engyōji a survécu à cette période difficile, bien que son influence ait diminué avec le temps.
Durant la période moderne qui a suivi, Engyōji a retrouvé une certaine notoriété, en partie grâce à son patrimoine architectural unique. Le temple a été classé comme bien culturel important du Japon, et plusieurs de ses structures, comme le Maniden (摩尼殿) et le Daikōdō (大講堂) sont des exemples remarquablement conservés de l'architecture religieuse japonaise (voir plus-bas).
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Caractéristiques du temple Engyōji
Le temple Engyōji, de par sa situation sur le mont Shosha, se distingue non seulement par son architecture traditionnelle imposante mais aussi par sa situation géographique. Ses caractéristiques remarquables continuent d'attirer les pèlerins et les touristes du monde entier.
Voici un aperçu de ses principales caractéristiques:
Situation géographique
Le temple Engyōji est perché sur le mont Shosha, à environ 371 mètres d'altitude. Le mont Shosha est situé au nord-ouest du célèbre château de Himeji, à environ 10 kilomètres.
Pour atteindre le temple, les visiteurs peuvent emprunter un téléphérique depuis le pied de la montagne, suivi d'une marche à travers une forêt dense. Cette situation en hauteur, entourée de la nature contribue à l'atmosphère sereine et mystique du site. Une visite particulièrement bienvenue en été, lors des fortes chaleurs.
Taille et étendue du complexe
Le complexe du temple s'étend sur une vaste zone couvrant plusieurs hectares. Il est constitué de nombreux bâtiments et structures répartis sur tout le mont Shosha, dont plus de 20 sont reconnus pour leur valeur patrimoniale.
Engyōji comprend plusieurs zones distinctes, dont la zone principale avec les bâtiments majeurs, des pavillons secondaires, des halls de méditation, ainsi que des sentiers de randonnée qui relient les différentes parties du complexe.
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Architecture et structures principales
Le temple Engyōji se caractérise par une architecture traditionnelle japonaise, typique des temples de l'école Tendai.
Voici les structures les plus notables du complexe:
Maniden (摩尼殿): Le Maniden est l'une des structures les plus emblématiques d'Engyōji. Ce hall principal, dédié à la déesse Kannon, est construit dans le style Shinden-zukuri, un style architectural aristocratique de la période Heian.
Le hall est érigé sur une plateforme en bois qui surplombe une vallée, offrant des vues spectaculaires. Le Maniden actuel a été reconstruit en 1932, mais il est basé sur des structures antérieures datant de la fondation du temple.
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Daikōdō (大講堂): Ce bâtiment, connu sous le nom de "Grande Salle de Conférence", est un autre élément clé du complexe. Il est utilisé pour les cérémonies religieuses et les enseignements. Le Daikōdō est construit dans le style architectural traditionnel des temples japonais, avec un toit en croupe recouvert de tuiles, et il est entouré de vérandas.
Jōgyōdō (常行堂): Le Jōgyōdō est une salle dédiée à la méditation et à la pratique du bouddhisme. Elle est utilisée pour les retraites spirituelles et les exercices de méditation de longue durée, connus sous le nom de "Jōgyō".
Jikidō (食堂): Ce bâtiment, autrefois utilisé comme réfectoire et dortoir pour les moines, est l'une des structures les plus anciennes du complexe. Le Jikidō abrite aujourd'hui une collection d'artefacts historiques et d'objets liés à l'histoire du temple.
Ninnōdō (仁王堂): Situé à l'entrée du complexe, le Ninnōdō est le hall qui abrite les célèbres statues des 2 gardiens, Agyō et Ungyō que l'on retrouve dans de nombreux temples d'importance. Ce hall marque l'entrée sacrée du temple et protège le site des esprits maléfiques.
Engyōji dans la culture populaire
Le temple Engyōji a gagné en notoriété dans la culture populaire moderne, en particulier à travers son utilisation comme lieu de tournage pour des films, des séries télévisées, et même des publicités. Son architecture traditionnelle et son cadre naturel spectaculaire en font un lieu de choix pour représenter des scènes historiques ou spirituelles dans diverses productions audiovisuelles.
Voici un aperçu de certaines œuvres marquantes qui ont été tournées au temple Engyōji:
Le Dernier Samouraï (2003)
Le film "Le Dernier Samouraï" (The Last Samurai) est sans doute l'œuvre la plus célèbre tournée au temple Engyōji. Réalisé par Edward Zwick et sorti en 2003, ce film met en vedette Tom Cruise dans le rôle de Nathan Algren, un capitaine de l'armée américaine qui se retrouve impliqué dans un soulèvement samouraï au Japon à la fin du 19e siècle.
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Dans ce film, Engyōji sert de cadre pour représenter le village et le monastère où le personnage de Tom Cruise est capturé et réhabilité par les samouraïs, sous la direction de leur chef, Katsumoto, interprété par Ken Watanabe.
Le Maniden, une des principales salles du temple, est notamment visible dans plusieurs scènes importantes. Ce film a contribué à attirer l'attention internationale sur Engyōji, le transformant en une destination prisée non seulement pour les amateurs de cinéma, mais aussi pour les touristes intéressés par la culture japonaise.
The Time Traveler's Wife (2009)
Une autre œuvre notable où le temple apparaît est la série télévisée "The Time Traveler's Wife", diffusée en 2009. Bien que l'utilisation du temple dans cette série soit plus symbolique, les scènes tournées à Engyōji apportent une dimension spirituelle et mystique à l’histoire. Le cadre serein et les bâtiments anciens du temple ont été utilisés pour représenter des moments méditatifs et des flashbacks dans le passé des personnages principaux.
Rurouni Kenshin (2014)
La série de films "Rurouni Kenshin", inspirée du célèbre manga du même nom, a également utilisé le temple Engyōji comme lieu de tournage. En particulier, "Rurouni Kenshin: Kyoto Inferno" (2014), le deuxième film de la série, présente des scènes filmées à Engyōji.
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Dans ce film, Takeru Satoh, qui joue le rôle principal de Kenshin Himura, un ancien assassin cherchant la rédemption, est montré dans des scènes se déroulant dans des temples et des environnements spirituels, reflétant le conflit intérieur du personnage. Les décors majestueux d'Engyōji ajoutent une dimension historique et esthétique aux confrontations du personnage avec ses ennemis et ses propres démons.
Silence (2016)
Le film "Silence", réalisé par Martin Scorsese et sorti en 2016, est un autre exemple de l'utilisation du temple Engyōji dans le cinéma international. Ce drame historique se déroule au Japon au 17e siècle et raconte l'histoire de deux prêtres jésuites, joués par Andrew Garfield et Adam Driver, qui voyagent au Japon pour retrouver leur mentor disparu, joué par Liam Neeson, et pour propager le christianisme malgré les persécutions sévères.
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Engyōji, avec son atmosphère authentique et ses paysages naturels, a été utilisé pour recréer des scènes se déroulant dans des monastères et des villages japonais reculés. Le film met en lumière les défis spirituels et physiques auxquels sont confrontés les personnages, et le temple contribue à l'atmosphère oppressante et contemplative du récit.
Séries télévisées et médias
En dehors du cinéma international, Engyōji est fréquemment utilisé dans des dramas japonais historiques appelés Jidaigeki et diverses séries télévisées. Son cadre authentique en fait un lieu privilégié pour les productions qui cherchent à représenter le Japon féodal ou des périodes de l’histoire où la spiritualité et la vie monastique étaient centrales. Ces productions contribuent à maintenir l’image du temple comme un lieu chargé de mysticisme et d’histoire.
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Le mot de la fin
Le temple Engyōji incarne une symbiose parfaite entre architecture, nature et mysticisme. Sa situation géographique, enveloppée par une forêt dense et érigée en hauteur, symbolise un éloignement des préoccupations mondaines, une ascension vers le sacré.
Cette élévation physique et spirituelle se reflète dans l'architecture même du temple, où chaque bâtiment semble émerger de la nature, comme une extension harmonieuse de la montagne. Chaque structure respire une austérité sereine, une simplicité qui s'oppose à l'opulence, favorisant la contemplation et l'introspection.
En photographie monochrome, le temple Engyōji révèle une dimension cachée de cette relation entre architecture et nature. Photographier Engyōji devient une pratique mystique en soi, une exploration des formes et des espaces qui révèlent le temple comme une métaphore visuelle de la sérénité intérieure.
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